Annoncé en conférence de presse ce mardi, le projet de réforme porté par le gouvernement Borne confirme le report de l’âge légal de départ à la retraite à 64 ans et la fin annoncée des régimes spéciaux de retraite. Cette note résume précisément les annonces de la première ministre (voir page 3).
Toujours dans un souci de passage en force, le gouvernement intègrera ces mesures au projet de loi de financement de la sécurité sociale rectificatif (PLFSSR). Ce tour de passe-passe devrait permettre au gouvernement de limiter les discussions autour des mesures de la réforme à 20 jours à l’Assemblée nationale permettre une utilisation sans limite de l’article 49 alinéa 3 de la constitution si nécessaire
A ce déni de démocratie on ne peut que constater le cynisme complet dont fait preuve le gouvernement puisqu’il s’est félicité des concertations et du dialogue social autour de la réforme alors que l’ensemble des organisations syndicales et de jeunesse du pays ont dès les premières annonces exprimées leur opposition la plus complète. On rappellera au gouvernement qu’il avait prévue d’annoncer la réforme en décembre alors même que les pseudo-concertations n’étaient pas finies.
Les points essentiels de la réforme |
– Report de l’âge légal de départ à la retraite de 62 à 64 ans pour tous les actifs
« indépendants, salariés, et fonctionnaires » à partir de la génération 1961 et à raison de 3 mois chaque année jusqu’en 2030. – Report de 2 ans de tous les départs anticipés – Accélération des mesures Touraine : 43 ans de cotisation seront requis dès la génération 1965 soit en 2027 – Suppression des régimes spéciaux pour les nouveaux embauchés au 1er septembre 2023 – Minimum de pension pour une carrière complète au niveau du SMIC relevé à 1200 euros – Modification du dispositif carrière longue |
Un faux constat de départ
Le gouvernement ne cesse de répéter que notre système est au bord de la faillite, qu’il est durablement déficitaire. Mais la répétition ne fait pas la véracité des propos !
En effet, comme le montre en fait le rapport du Conseil D’orientation des Retraites de façon très claire notre système est actuellement excédentaire de près de 900 millions d’euros en 2021, et devrait dégager un excédent de 3,2 milliards d’euros en 2022 (soit 0,1 point de PIB). Néanmoins, le gouvernement envisage des économies de 17,7 milliards pour 2030 dont 13,5 milliards € pour financer les déficits estimés et 4,2 milliards qui devraient permettre de financer des mesures de saupoudrage, loin des besoins de la population. Inutile de préciser que le cadrage financier de la réforme n’est pas fini et des surprises sont à attendre dans le PLFSSR.
Insistons sur le fait que la prévision de déficit du gouvernement est totalement contestable puisqu’elle serait due principalement entre 2021 et 2027 à une dégradation des ressources du régime de retraite à cause de la maitrise des dépenses de personnel du secteur public et du développement des primes. Entre 2027 et 2032, ce déficit résulterait majoritairement d’un effet statistique liées aux hypothèses économiques du gouvernement.
En tout état de cause à plus long terme et malgré le vieillissement de la population, la part des dépenses de retraite serait stable voir même en diminution par rapport à la richesse nationale.
Inutile de s’en prendre aux retraites pour trouver 12 milliards
Ce n’est donc pas du côté de la solidité financière du système qu’il faut chercher les véritables motivations de la réforme ; il s’agit en réalité d’utiliser les fonds dédiés à la retraite pour de nouvelles baisses d’impôts pour les entreprises !
En effet, la Contribution sur la Valeur Ajoutée des Entreprises (CVAE) va être supprimée, pour un coût de 9 Mds d’€ et qui profitera d’abord aux grands groupes. Rappelons que les aides publiques aux entreprises représentent 13 fois le déficit annoncé des retraites !
Prenons Bruno Le Maire au mot : même si l’urgence de trouver 12 milliards d’euros était avérée, il existe de multiples moyens de les trouver sans avoir à s’en prendre à notre système de retraites.
Rappelons que 12 milliards c’est bien moins que ce que coûte l’ex CICE et sa pérennisation
chaque année (+ de 20 milliards d’euros).
En augmentant les salaires de 5% on aurait d’ores et déjà 9 milliards de cotisations rien que
pour les salariés du privé, soit la moitié que ce que le gouvernement espère économiser.
Enfin, alors que l’hôpital public est en train de craquer, des centaines de milliers d’embauches sont nécessaires. En embauchant 300 000 fonctionnaires dans la fonction publique hospitalière, ce sont près de 5 Mds€ supplémentaires qui seraient collectés pour les retraites
L’idée selon laquelle le système serait en danger est donc totalement fausse !
Les propositions du gouvernement Borne
Report de l’âge légal de départ à la retraite, accélération des mesures Touraine et dispositif carrières longues
En premier lieu, cette réforme est dite « universelle » et porte l’âge légal de départ à la retraite de 62 à 64 ans pour tous les actifs « indépendants, salariés et fonctionnaires ».
Le report de l’âge légal devrait s’effectuer sur les bases d’un report de 3 mois chaque année pour atteindre 63 ans et 3 mois à la fin du quinquennat en 2027 et 64 en 2030.
Le tableau ci-dessous résume les effets de ce report pour chaque génération. Ce sont donc les travailleurs nés en 1968 qui devraient partir les premiers à 64 ans.
Naissance | Age d’ouverture | Entrée en application |
Entre le 1er septembre et le 31 décembre 1961 | 62 ans et 3 mois | 1er septembre 2023 (effet 1er décembre 2023) |
Année 1962 | 62 ans et 6 mois | 1er janvier 2024 (effet 1er juillet 2024) |
Année 1963 | 62 ans et 9 mois | 1er janvier 2025 (effet 1er octobre 2024 ) |
Année 1964 | 63 ans | 1er janvier 2026 (effet 1er janvier 2027) |
Année 1965 | 63 ans et 3 mois | 1er janvier 2027 (effet 1er avril 2028) |
Année 1966 | 63 ans et 6 mois | 1er janvier 2028 (effet 1er juin 2029) |
Année 1967 | 63 ans et 9 mois | 1er janvier 2029 (effet 1er septembre 2030) |
Année 1968 | 64 ans | 1er janvier 2030 (effet 1er janvier 2032) |
En plus de ce report, cette proposition de réforme devrait s’additionner à une accélération des mesures de la réforme Touraine de 2014. Pour rappel, cette réforme devait allonger la durée de cotisation à 43 ans pour la génération nait en 1973.
Avec les mesures du gouvernement Borne, les 172 trimestres de cotisation nécessaire soit 43 annuités devraient être exigés dès la génération 1965, c’est à dire dès 2027.
Durée d’assurance requise | Mesure Tourraine | Annonces Borne |
168 trimestres | Années 1961 à 1963 | 1er janvier au 31 août 1961 |
169 trimestres | Années 1964 à 1966 | A compter du 1er septembre 1961 et Année 1962 |
170 trimestres | Années 1967 à 1969 | Année 1963 |
171 trimestres | Années 1970 à 1972 | Année 1964 |
172 trimestres | Année 1973 | Année 1965 |
En somme, le report de l’âge légal de départ à la retraite de 62 à 64 ans devrait se coupler avec une accélération des mesures Touraine sur l’augmentation du nombre de trimestres nécessaires pour un départ en retraite à tôt plein.
Le recul de l’âge légal se fait sans hausse de l’âge d’annulation de la décote qui reste à 67 ans. En revanche, il impactera les départs anticipés, notamment les catégories actives dans le public et les régimes spéciaux pour qui l’âge d’ouverture des droits sera décalé de deux ans.
Le dispositif carrière longue évolue aussi. Si aujourd’hui, il permet aux travailleurs et travailleuses ayant commencés à travailler avant 20 ans de partir 2 ans plus tôt à 60 ans, et même 58 ans pour ceux ayant commencé à travailler avant 16 ans, avec cette réforme la situation de ces travailleurs et travailleuses va changer :
- Si début avant 16 ans, départ possible à compter de 58 ans si 44 annuités ;
- Si début avant 18 ans, départ possible à compter de 60 ans si 44 annuités ;
- Si début avant 20 ans, départ possible à compter de 62 ans si 42 annuités
De plus, la portabilité du service actif est instituée et la clause d’achèvement de la carrière en
catégorie active supprimée.
A noter : le recul de l’âge de départ à la retraite s’effectue plus vite que l’augmentation de l’espérance de vie.
Cette réforme est d’une violence historique puisqu’il s’agit de la première fois où les mesures annoncées vont faire baisser la durée effective de retraite de la population française.
Fin des régimes spéciaux
Cette réforme annoncée par le gouvernement poursuit la casse des régimes dits spéciaux de retraite en reproduisant pour la RATP, les clercs et employés de notaires, les personnels de la banque de France ainsi que les membres du Conseil économique social et environnemental, et les Industries électriques et Gazières (IEG) ce qu’il avait déjà fait pour la SNCF en 2019.
Ainsi à partir du 1er septembre 2023, les nouveaux embauchés dans ces entreprises et secteurs seront obligatoirement affiliés au régime général pour leur retraite de base et complémentaire. Cette annonce fait système avec la casse des statuts et la privatisation des entreprises autrefois publiques. Dès la génération 1961, l’âge d’ouverture des droits sera décalé d’au moins deux ans dans tous les régimes spéciaux, y compris ceux que le gouvernement ne supprime pas (marins, opéra de Paris…)
Elle va à rebours complet de la reconnaissance de la pénibilité dans ces secteurs et remet en cause l’attractivité des métiers aujourd’hui particulièrement défaillante. Le gouvernement justifie cette suppression au nom d’une organisation du travail révolue dans ces entreprises et au nom de la suppression des inégalités de traitement avec les salariés du privé. Aujourd’hui par exemple, la SNCF peine à recruter, notamment du fait de la suppression du statut pour les nouveaux embauchés.
Les régimes spéciaux représentaient 21 milliards d’euros en 2021 soit à peine 5% du total du système de retraites et leur poids se réduit d’année en année. Leurs pseudo déficits sont essentiellement dus au fait que les entreprises concernées ont supprimé des dizaines de milliers de postes et les nouveaux embauchés ne sont pas tous concernés par la sur-cotisation qu’impliquait le régime spécial.
Les économies que représenteraient la fin des régime spéciaux se matérialiseront d’ici plusieurs dizaines d’années et représentent des bouts de chandelles par rapport à l’ensemble du système de retraites.
La CGT rappelle que les régimes dits spéciaux de retraite sont des régimes pionniers en matière de droit à la retraite et qu’ils sont justes et adaptés à l’organisation du travail dans ces secteurs.
Une attaque contre la branche AT-MP
Le gouvernement envisage une contribution des employeurs à travers une hausse de la part dite patronale des cotisations en matière de retraite. Mais il ne s’agit que d’un tour de passe-passe comptable puisque le gouvernement va en même temps baisser les cotisations « patronales » en matière d’accident du travail / maladie professionnelle. Le dogme de non-augmentation du « coût du travail » et des impôts pour les entreprises reste intact et ce alors même que les profits sont records.
En effet, la branche AT/MP est excédentaire. Un excédent qui pourrait atteindre 2.2 milliards d’euro pour 2023, selon les prévisions qui vont s’ajouter aux 6 milliards actuels. La raison de cet excédent est simple : les accidents du travail et les maladies professionnelles en France, sont insuffisamment déclarés et mal réparés. Une sous déclaration en lien direct avec la dissimulation des AT et la pression patronale sur les travailleurs. Il ne s’agit donc pas là d’une manne financière utilisable pour les retraites mais bien de comptes faussés par les pratiques des entreprises. L’excédent actuel de la branche AT-MP couvrirait potentiellement à peine la sous-déclaration qui était estimée à 2.1 milliards d’euros en 2021 et qui ne cesse de croitre.
Il s’agira aussi par ce principe de limiter les moyens de la branche AT/MP. En effet, nous y voyons à terme une diminution des budgets liés à la réparation des préjudices subis par les travailleurs victimes du travail et des budgets dédiés à la prévention (moyens humains et matériel pour les CARSAT/CRAM/CGSS et pour la recherche en santé au travail – INRS).
Retarder l’âge de départ à la retraite n’est pas bénéfique pour l’emploi des séniors
Le gouvernement martèle que sa réforme des retraites sera bénéfique pour l’emploi des séniors, qu’ils sont une richesse pour l’entreprise du fait de leur qualification et leur expérience. Pour autant, décaler de deux ans l’âge légal de départ à la retraite ne veut pas dire que tous les travailleur.euse.s sénior.e.s travailleront deux ans de plus! C’est ce qu’on appelle le SAS de précarité, dans lequel figurent les séniors qui ne sont pas encore à la retraite, mais pas non plus en emploi.
À ce titre, un rapport de l’Inspection Générale des Affaires Sociales (IGAS) rendu décembre dernier à la Première Ministre Borne notait que la précédente réforme (2010, décalant l’âge légal de départ à la retraite de 60 à 62 ans) avait eu pour effets des périodes de chômage conséquentes pour les travailleur.euse.s : « les deux années supplémentaires nécessaires pour atteindre l’AOD [Âge d’Ouverture des Droits] s’étant ainsi caractérisées, de manière significative, par des périodes de chômage supplémentaires ».
En effet, à 60 ans, 1 actif sur 2 seulement est encore en activité, que ce soit à temps partiel ou à temps complet !
L’augmentation du nombre d’annuité à valider, en lien avec le report de l’âge de départ à la retraite, entrainera donc un allongement du sas de précarité et une baisse massive du nombre de travailleur.euse.s en capacité d’atteindre une carrière complète (avec des répercussions sur le niveau des pensions).
Autrement dit cette réforme, cherche à mettre en emploi coute que coute les travailleur.euse.s « seniors » alors même qu’ils ne le peuvent pas soit pour des raisons de santé soit parce qu’il n’y a pas d’emploi compte-tenu des stratégies des entreprises. Cette réforme fait ainsi système avec
celles de l’assurance-chômage et du RSA de mise au travail forcée des travailleur.euse.s avec la réduction à un strict minimum de leurs droits de protection sociale.
Index sénior : une idée vieille toujours inutile
Le gouvernement appelle à la création d’un index sénior afin d’encourager les bonnes pratiques des entreprises envers leurs salariés les plus âgés. Il sera obligatoire dès 2023 dans les entreprises de plus de 1000 salariés et obligatoire pour celles de plus de 300 en 2024.
Une mesure plus que faible pour favoriser l’emploi des séniors. En effet, aucune sanction n’est annoncée. De plus, nous n’avons aucune information sur la façon dont cet index sera construit. L’inedx égalité F/H, qui a des sanctions, a été construit sur mesure pour permettre à la quasi- totalité des entreprises d’échapper aux sanctions avec des biais grossiers dans le calcul. Résultat, Malgré l’index de l’égalité professionnelle entre les hommes et les femmes, les femmes gagnent toujours en moyenne 28% de moins que les hommes.
Minimum de pension (MICO) relevé à 1200 euros
Le minimum de pension (MICO) augmentera de 100 € par mois pour les personnes partant en
retraite à compter du 1er septembre 2023 (+25 € au titre du minimum de pension de base et
+75 € au titre de la majoration du minimum de pension, qui valorise les périodes effectivement
en emploi).
Un salarié qui a travaillé au Smic toute sa vie devrait bénéficier d’une retraite de 1 200 € par
mois, soit 85 % du Smic net, soit 100 euros de plus que le seul de pauvreté en France.
Il s’agit d’une mesure prévue dans la loi depuis 2003, qui ne bénéficiera qu’à une petite minorité de salarié.e.s. En effet, elle est conditionnée à une carrière complète, avec un nombre de trimestre qui va augmenter. Or, déjà aujourd’hui, 83% des salarié.e.s touchant moins de 1000€ de pension n’ont pas de carrière complète, dont une grande majorité de femmes. C’est la raison pour laquelle en moyenne, les bénéficiaires du minimum contributif partent déjà actuellement plus tardivement que les autres : à 64 ans contre 62,4 ans en moyenne pour les non- bénéficiaires.
Une réforme bénéfique aux femmes ?
Aujourd’hui, la pension moyenne perçue par les femmes est inférieure de près de 40% à celle des hommes. Même en prenant en compte les pensions de réversion et de la majoration pour enfants, la retraite moyenne des femmes reste inférieure de 25,2% à celle des hommes.
Pour cause : à chaque fois que l’on repousse la durée de cotisation requise, on la rend toujours moins atteignable pour les femmes, notamment par l’absence de politiques ambitieuses d’égalités H/F et des temps partiels subis notamment (En 2020, 26 % des femmes salariées à temps partiel le sont pour s’occuper de leurs enfants ou d’une personne dépendante [INSEE]).
Allonger encore la durée de cotisation creuserait donc encore le fossé des inégalités entre les femmes et les hommes.
Les travailleurs handicapé.e.s : grands oubliés, grandes victimes
Les personnes en situation de handicap passent en moyenne 8,5 années sans emploi après 50 ans (contre 1,8 ans pour l’ensemble de la population). Une situation qui pousse les travailleurs handicapés à retarder au maximum le départ à la retraite pour valider le plus de trimestres possibles. Ils liquident leur retraite à 62,4 ans en moyenne, 0,3 ans de plus que l’ensemble de la population. Par ces 8,5 années en moyenne, les travailleurs handicapés subissent de plein fouet le système de décote et de fait la baisse des pensions.
De fait, reporter l’âge de départ à la retraite ne permettra pas une meilleure embauche des travailleurs handicapés mais reportera plutôt la période de précarisation et d’instabilité qui caractérise la pré-retraite. À 61 ans, c’est-à-dire juste avant l’âge légal minimal de départ à la retraite actuellement, 16 % des travailleurs handicapés sont en emploi en 2020, contre 53 % pour les travailleurs en général.
Même si les conditions pour partir en retraite anticipé pour handicap peuvent s’assouplir, avec l’annonce de la seule condition d’avoir cotisé un nombre minimal de trimestre de 132 années, et non plus non plus 132 trimestres dont 112 effectivement cotisés comme actuellement, il ne faut pas oublier que le handicap doit être justifié pour toute la durée d’assurance. Aujourd’hui, seul 15% des handicap sont de naissance ou surviennent pendant l’enfance. A contrario, 17% des situations de handicap ont pour origine un accident du travail ou une maladie professionnelle. La reconnaissance administrative du handicap arrive bien souvent trop tard dans la carrière des travailleur.euse.s, limitant leur accès au dispositif de retraite anticipé.
C2P et prise en compte de la pénibilité
Pour faire passer la pilule, le gouvernement promet une meilleure prise en compte de la pénibilité tout au long de la carrière, via le Compte Professionnel de Prévention (C2P). Deux critères (seulement) seront donc améliorés pour l’acquisition des points :
- Le seuil de travail de nuit passera de 120 à 100 nuits par an ;
- Le seuil du travail en équipes successives alternantes passera de 50 à 30 nuits par an ;
Ces mesures déjà bien insuffisantes ne cacheront pas l’arnaque que représente le C2P et la promesse d’une prise en compte de la pénibilité : Depuis la mise en place du compte individuel de pénibilité, seul·es 11 000 salarié·es partent en départ anticipé chaque année alors que 40 % des emplois présentent au moins un critère de pénibilité et 10% en cumulent 3 (source DARES). La faute à un dispositif trop restrictif (il manque toujours 4 critères et les seuils d’exposition sont très élevés), mal pensé et très peu effectif.
On rappelle que la pénibilité est globalement mal prise en compte, notamment celle des métiers féminins dans lesquels la pénibilité est davantage liée à une répétition très fréquentes de gestes ou postures, plus qu’à des conditions directement observables comme l’exposition au bruit ou au froid. Cette prise en compte est d’autant plus mauvaise que les critères allant dans ce sens ont été supprimés en 2017… par les ordonnances Macron !
Dans la réforme actuelle, le gouvernement affiche un souci de façade pour ces questions, avec la création d’un fond d’un milliard destiné à investir dans la prévention de l’usure professionnelle.
En trois mots :
- 1 milliard, c’est bien peu face à l’ampleur du sujet ;
- Encore faut-il savoir à quoi sera concrètement employer ce fond
- La seule manière de lutter efficacement contre l’usure professionnelle est de changer l’organisation réelle du travail (en réduisant les cadences, et en limitant l’intensification du travail par exemple).
L’enfumage du gouvernement sur le financement des retraites
Les fausses économies d’une réforme des retraites
Les économies prévues par le gouvernement ne tiennent pas compte qu’un report de l’âge de
départ en retraite implique de nombreuses nouvelles dépenses.
On troque des dépenses « positives » c’est-à-dire les dépenses de pensions de retraites contre des dépenses plutôt « réparatrices » comme des allocations chômage, des pensions invalidité, du RSA,etc
En effet, lorsque l’on recule l’âge de la retraite, cela implique de nombreux travailleurs supplémentaires au chômage, soit du côté des jeunes qui ont des débouchés réduits pour trouver emploi soit des travailleurs plus âgés qui ne trouvent plus d’emploi à l’âge de la retraite. Inévitablement, cela implique des dépenses sociales supplémentaires.
D’autre part, avoir des travailleurs plus âgés, cela se traduit dans les faits par davantage d’accidents du travail et de maladies professionnelles. Le gouvernement veut prendre les excédents de cette branche de la Sécu pour financer les retraites sans prendre en compte que le recul de l’âge de la retraite va augmenter fortement les besoins à couvrir pour cette branche.
De plus, avec le recul de l’âge de départ en retraites, de nombreux travailleurs supplémentaires vont finir leur carrière et devoir attendre la retraite en situation d’invalidité. Cela aussi implique des dépenses.
Ces dépenses supplémentaires se chiffrent entre 5 et 8 milliards d’euros selon le rapport du COR soit au moins 1/3 des économies attendues.
On a donc simplement un remplacement du type de dépenses mais des économies globales discutables.
Les cotisations sont du salaire socialisé
A chaque réforme des retraites, les conditions de discussions sont les mêmes. Toutes les solutions sont entendables à condition de « ne pas augmenter le coût du travail ». Impossible donc d’augmenter les cotisations pour les employeurs alors que cela devrait être la solution naturelle en cas de déficit du système.
Ainsi le gouvernement parle des hausses de cotisations uniquement en disant qu’elles coûtent aux salariés car réduisent le salaire net.
Pourquoi ne jamais évoquer les cotisations sociales employeurs ? Bruno Le Maire prend
l’exemple d’un salarié pour qui 1 point de cotisation coûterait 440€ nets par an. Cela est vrai
pour un salarié qui gagne 3 700€ bruts par mois soit 2,2 fois le Smic, ce qui est loin du salaire
de nombreux salariés.
Pour un salarié au Smic, 1 point de cotisation représente 17€ par mois, soit moins de 200€ par
an.
Avec un partage à 50% entre cotisation salariales et patronales (on peut même faire 100% cotisations patronales), on arrive donc à 8,5€ par mois de salaire net en moins pour salarié au Smic soit 100€ par an. C’est déjà beaucoup moins spectaculaire que les 440€ annoncés par Bruno Le Maire.
Surtout, ce sont bien des hausses de salaires que nous défendons ! Un salaire plus élevé, c’est aussi plus de salaire socialisé et donc plus de financement pour nos retraites. Toute hausse de cotisation, et tout financement pour les retraites doivent être arrachés à la part de la valeur ajoutée qui revient aujourd’hui au capital. Une note spécifique sur le financement de nos propositions en matière de retraite paraîtra prochainement.
Pour la CGT, c’est toujours : 60 ans !
Cette réforme n’est absolument pas à la hauteur des enjeux et s’oppose diamétralement à la
toutes les revendications de la CGT.
Il faut donc défendre collectivement la baisse de l’âge légal de départ à la retraite avec un niveau
de pension en aucun cas inférieur au niveau du Smic proposé par la CGT (2 000 euros brut).