Cabines de télémédecine : stop !

Le Billet d’Humeur de Christophe PRUDHOMME
Une enquête menée par l’Assurance maladie en Ile-de-France révèle des différences notables entre les pratiques des médecins généralistes en cabinet et celles de ceux travaillant pour des plateformes dédiées à la  téléconsultation.
D’une part les patients sont pour plus de 80 % des personnes de moins de 40 ans, inconnues des médecins présents en ligne. Le bilan souligne un coût élevé et des prescriptions disproportionnées avec un grand nombre de consultations facturées illégalement avec des majorations de nuit ou de dimanche.
Plus grave en termes de santé publique, les médecins ne pouvant effectuer un véritable examen clinique jouent la carte de la sécurité et prescrivent 2,5 fois plus d’antibiotiques que les généralistes en cabinet. Par ailleurs, près de 20 % des consultations sont suivies d’une nouvelle consultation dans la semaine, souvent en présentiel.
Il s’agit là d’éléments montrant une dérive commerciale encouragée par les responsables politiques successifs qui ont voulu faire croire que la technologie pouvait pallier la baisse de la démographie médicale. De plus, cela va à l’encontre des préconisations qui indiquent que la télémédecine peut être utile pour le suivi de patients atteints de maladies chroniques par leur médecin traitant en collaboration avec d’autres professionnels de santé, notant les infirmier.e.s.
Comme sur d’autres questions, le gouvernement actuel manipule l’information pour éviter le débat sur les vrais problèmes.
Nous avons ainsi assisté récemment au jeu du bon et du méchant entre le ministre des transports et celui de la santé. D’un côté, celui en charge de la SNCF encourage la transformation des gares en vaste centres commerciaux avec l’annonce d’un plan d’installation de 300 centres de télémédecine dans ces locaux où il sera bientôt plus facile de repartir avec une ordonnance que de pouvoir obtenir des renseignements auprès d’un agent SNCF.
De l’autre, un ministre de la santé, véritable Ponce-Pilate, qui se montre sceptique mais déclare que ce pourrait être un outil complémentaire qui cependant ne peut être isolé du parcours de soin. Bref, comme disait Coluche, ils se foutent bien de notre gueule.
Pendant ce temps, oubliée la promesse du président de la République, que chaque assuré social ait un médecin traitant à la fin de l’année 2023 ! Oublié le mensonge sur la suppression du numerus clausus. Il faut effectivement 10 ans pour former un médecin, soit le temps des deux mandats d’E. Macron. Mais à la fin de son mandat, il y aura encore moins de médecins et surtout moins de généralistes qu’aujourd’hui.
Il est donc urgent d’exiger l’arrêt immédiat de la prise en charge par la Sécurité sociale de ces dérives de la télémédecine qui n’ont pour but que d’enrichir ceux que l’on appelle les « prédateurs de la santé », déjà présents dans les EHPAD et dans une bonne partie des cabinets dentaires et ophtalmo.
Alors ouvrons le débat sur un véritable service public de la santé répondant aux besoins de la population et arrêtons les solutions qui transforment la santé en service marchand financiarisé, ce qui renforcera encore plus les inégalités d’accès aux soins.
Dr Christophe Prudhomme
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