Le « Projet de loi de simplification de la vie économique » qui sera discuté à partir du 3 juin au Sénat a été présenté, cette semaine, au Conseil des Ministres. Ce projet à tambour battant est l’une des faces d’un plan plus large de 50 mesures dites de « simplification ».
Il a été en première apparence expurgé des propositions qui ont un impact sur le droit du travail qui feront, elles, l’objet d’un projet de loi travail II prévu à l’automne que la CGT combattra de toutes ses forces pour porter un autre projet de progrès social pour le monde du travail.
Mais, à y regarder de plus près, ce projet comporte un certain nombre de mesures qui cachent des possibles régressions sur les droits sociaux et le travail.
En effet, ce soi-disant « choc de simplification » va s’attaquer à la fiche de paie, aux arrêts maladie et attestations chômage, aux données de santé, au contrôle démocratique et obligations environnementales sur les grands projets industriels, au droit d’information des salarié·es en cas de cession d’une entreprise ou encore aux droits qui seraient favorables en France par rapport à des directives européennes.
Globalement, l’état d’esprit est clair.
Le côté face de la pièce : faire une confiance aveugle aux entreprises, les accompagner sans les contrôler, de quoi rejoindre les propositions des organisations patronales telles que la CPME et le Medef.
Du côté pile pour les droits des salarié·es et des agent·es public·ques : des outils de contrôle en moins contre les dérives et fraudes patronales et des missions qui se tournent vers les intérêts privés au lieu de l’intérêt général.
Pour la CGT, la disparition du détail des cotisations sociales, du paiement des heures supplémentaires (…) sur les fiches de paie augmente le risque de ne pas détecter des erreurs préjudiciables aux salarié ·es.
Ce projet est un des outils qui accompagnera les velléités du gouvernement et du patronat de réduire le salaire socialisé et les droits des travailleurs et travailleuses, des privé·es d’emploi et retraité·es en matière de sécurité sociale, d’assurance chômage…
Il s’attaque également aux données de santé alors qu’elles auraient, au contraire, besoin de plus de protection.
Toujours sous couvert de faciliter la vie des entreprises, il réduit la protection des salarié·es, en cas de cession et reprise d’entreprise.
Alors que les enjeux industriels et environnementaux sont cruciaux et qu’ils nécessitent un débat démocratique qui implique les travailleurs et travailleuses et la population plus largement, il supprime la consultation de la Commission Nationale du Débat Public qui a pourtant permis de porter des projets CGT de transformation de l’appareil productif.
Ce projet lève aussi de fait la compensation environnementale qui doit pourtant accompagner chaque projet.
Sans oublier le développement des data centres et de l’Intelligence artificielle sans questionner son impact environnemental et social.
Encore plus sournoisement, il propose de mettre des dispositifs en place pour « desurtransposer ». Ce terme barbare pourrait avoir des conséquences régressives ; par exemple, pour l’égalité salariale, en permettant entre autres de réduire le champ des entreprises contraintes à publier un index égalité. À l’heure où la transposition de la directive transparence salariale doit s’engager et qu’elle est l’occasion de faire avancer l’égalité, il y a de quoi largement s’inquiéter.
La CGT rappelle que la plupart des directives européennes, notamment dans le champ social, sont des directives d’harmonisation minimale qui permettent aux États membres qui le souhaitent d’adopter des dispositifs plus protecteurs des salarié·es. Alors que la campagne des élections européennes vient juste de débuter, proposer de « desurtransposer » des directives, comme le fait le plan de simplification, revient à fouler au pied un mécanisme fondamental de la construction européenne – et de l’Europe sociale, en particulier – destiné à assurer le progrès
social.
Montreuil 26 avril 2024